« La cohésion, c’est le premier facteur de performance »

Entretien de Nathalie Crépin réalisé pour Ouest-France et publié le 6 avril 2020.

La cohésion d’un groupe implique-t-elle la nécessité d’être ensemble ?

La cohésion suppose de rester uni dans l’attente d’un objectif final. Pour y parvenir, le contact est nécessaire, mais pas seulement. Car on distingue deux types de cohésion. Il y a la cohésion sociale, qui repose sur l’ambiance et l’envie de bien vivre ensemble, ce qui requiert un minimum d’inter-relations. Et il y a la cohésion opératoire, celle qui rassemble par un objectif commun.

La cohésion sociale est-elle essentielle à la cohésion opératoire ?

On a tendance à dire qu’elle interfère sur la performance. En fait, les études montrent l’inverse. Même s’il faut une certaine homogénéité entre les deux, ce qui prime, c’est la cohésion opératoire. Vous pouvez très bien ne pas vous entendre en dehors du terrain, mais être efficaces et performants.

Ce qui importe, c’est donc d’avoir un objectif commun ?

C’est essentiel. Comme il est primordial de partager une même idée des tâches à accomplir, de toute la logistique autour de la réussite et pas forcément sur l’ambiance du vestiaire. Aller au ciné ensemble, les jeux pour se mettre en situation et créer une cohésion… Ça reste des événements créés de toute pièce, assez artificiels, qui ne favorisent pas une cohésion de manière pérenne.

Avec le confinement, comment maintenir une cohésion ?

Il faut fixer des objectifs communs. Le coach ne doit pas forcément être impliqué, c’est davantage à l’ensemble de l’équipe de les partager. Et ce n’est pas évident quand il n’y a pas de compétitions.

On peut encore former une équipe sans se voir ?

La cohésion, dans la performance d’une équipe, c’est le premier facteur. Ne pas la maintenir, c’est risquer de perdre en efficacité. C’est important de continuer de la travailler, même en dehors de tout relationnel. Le but, c’est de conserver ce lien. Ça peut être des séances d’étirement par visio-conférence, par exemple. Ou la réalisation d’un reportage photos sur les deux dernières saisons de l’équipe, pour faire ressortir des éléments qui la structurent. On peut aussi se servir du confinement comme d’un temps fort, en amenant chacun à se demander quelle force il en retire.

Il ne faut pas que les craintes individuelles l’emportent ?

On doit pouvoir exprimer ces émotions individuellement, mais dans le souci d’une expression collective. Il faut continuer d’être porté sur des objectifs communs pour ne pas se cristalliser sur l’instant présent, particulièrement anxiogène. En période de confinement, le risque accru, c’est l’individualité. Or, même dans les sports individuels, aujourd’hui, on travaille sur le collectif. En athlétisme, très peu d’athlètes s’entraînent seul. On se sert du groupe comme d’une véritable dynamique. Le collectif, c’est un vrai moteur.

Article rédigé par Jean-Marcel Boudard, Mathieu Coureau et Julien Soyer pour Ouest-France.

Retrouvez l’article: ici

Coupe du monde de football 1998… 20 ans après ?

 

De multiples facteurs interfèrent et entrent en jeu dans la performance d’une équipe. Cependant, deux éléments paraissent prépondérant comme clefs de voute du succès et des  victoires : la cohésion et la communication.

« La performance individuelle, ce n’est pas le plus important. On gagne et on perd en équipe » Zinedine Zidane.

Si la cohésion et la solidarité sont des facteurs essentiels, la communication joue un rôle fondamental. La communication entre les joueurs bien sûr, mais surtout la communication de l’entraîneur envers ses joueurs.

Quand on parle de communication, on pense aux mots verbalisés bien sûrs mais pas seulement. Pour certains spécialistes, 93% de la communication est non verbale. On y inclus alors les attitudes, les postures, les mimiques, le ton de la voix… Ce sont des éléments primordiaux en communication.

 

Revenons sur le discours d’Aimé Jacquet avant le début de la coupe du monde en 1998, présenté dans ce formidable documentaire « Les yeux dans les bleus ».

Son attitude au début de la causerie exprime de la sérénité, du calme, son ton de voix est doux, rassurant.

Et il commence par : « Chaque fois que l’on est sur le terrain, c’est tout du bonus pour nous » « … parce que nous allons faire un long parcours » Son discours exprime toute sa certitude sur le succès de l’équipe et l’amène à se projeter, très rapidement, vers ce long et magnifique parcours.

« Et il faudra être prêts vendredi, et prêts ensuite » « J’aime bien aussi qu’il y ait une responsabilité collective » « Il va falloir être costauds et solidaires parce que l’on va en subir des chocs et des émotions et quel beau truc à vivre… un moment inoubliable dans votre vie de footballeur ». On y voit les conditions nécessaires à la réussite :

–          « Être prêt » parce qu’un match se gagne en partie…avant le match,

–          La responsabilité de chacun est essentielle dans la construction d’une réussite collective,

–          L’exploit ne peut s’inscrire uniquement dans les émotions qui le guident.

Il n’évoque pas la pression, le stress, la peur mais orientent les joueurs sur ces émotions « positives » et intenses, sur la rareté d’un tel ressenti, de la chance de cette opportunité qu’ils ont de vivre un tel évènement. Il donne ainsi des repères sur le déroulement de cette compétition.

Puis, il enchaine sur un ton plus appuyé, plus déterminé et plus tonique : « Utiles pour l’équipe et efficaces…et venez pas m’emmerder…Fixez-vous des objectifs ! Tous ! Qu’est-ce que je peux faire ? » Il insiste sur la notion du collectif : de l’importance de mettre le talent individuel au service du collectif pour être efficace. Il met en valeur aussi la nécessité de se fixer individuellement des objectifs. La fixation d’objectifs est un outil puissant en préparation mentale. Aimé Jacquet utilise comme fil conducteur de son discours, la responsabilité de chacun.

« Jouer comme vous le savez, simplement. Mettez-vous dans vos meilleures dispositions. En respectant le jeu que chacun va pratiquer comme à l’entraînement. » Jouer simple, comme à l’entrainement permet d’aborder les matchs avec confiance de faire « juste ce que l’on sait faire », sans « sur-jouer ».

« Fixez-vous des objectifs, demandez-vous ‘’Qu’est-ce que je dois faire ?’’ » Trois éléments reviennent régulièrement dans le discours d’Aimé Jacquet comme une prise de conscience, un ancrage fort pour la suite de la compétition : Se fixer des objectifs individuels ; entrer rapidement dans la compétition ; et se responsabiliser.

Enfin, Aimé Jacquet se retourne vers chacun des joueurs et exprime ce qu’il attend de lui, son registre de jeu et ses failles à combler. C’est le fameux « Muscle ton jeu Robert. Si tu ne muscles pas ton jeu, fais attention ! », en utilisant un ton péremptoire, le doigt pointé comme menaçant.

« Zizou, meneur ça veut dire : l’obligation de mettre en route le jeu pour les autres » « Toujours en première intention pour que tes attaquants soient dans les meilleures dispositions » « Tu as un peu exagéré ces derniers temps. Je sais, il y avait 50 milles au Maroc qui scandent ‘’Zizou, Zizou’’.C’est normal… » Il le recadre sur son poste de jeu et insiste sur la nécessité de se mettre au service des autres et du collectif. Il emploie un ton amusé, un peu ironique mais avec beaucoup d’empathie.

« Et je finirais par Steph. Tu as marqué combien de buts? » [Stéphane Guivarc’h)  : « 40 », Aimé Jacquet : « En ce moment, il est dans une période de doutes. Il attend le déclic. Le déclic vient à ceux qui sont audacieux, qui sont persévérants et ceux qui sont intelligents » « Respect total des attaquants. Respect total des attaquants parce que j’étais incapable d’être attaquant» Quel meilleur discours pour rassurer, redonner confiance ? Aimé Jacquet exprime sa confiance pour ce joueur. Le message est fort. Trois éléments facteurs de la réussite apparaissent ici : l’audace, la persévérance et l’intelligence !

Nul doute que Didier Deschamps sera trouver les mots et adopter la bonne attitude pour emmener ses joueurs vers le succès.

 

Nathalie Crépin

 

Entraîneurs : Communiquez !

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entraineur

« Le mot juste est un agent très puissant. Lorsqu’on trouve un de ces mots qui conviennent parfaitement, l’effet produit est tant physique que mental, et incroyablement rapide »
Mark Twain.

Tous reconnaissent la place de l’entraîneur, du coach, dans les performances de l’athlète, de l’équipe. Si ses apports sur le plan technique et tactique paraissent déterminants, on occulte parfois la place centrale des mots, de la communication, de son discours sur la gestion de l’athlète et du groupe mais aussi de leur impact sur les résultats.
Nous avons tous des mécanismes mentaux que nous utilisons pour percevoir, évaluer, traiter l’information et décider. Ils sont le plus souvent « inconscients » et sont des organisateurs de nos perceptions et de nos moyens d’agir. Ils induisent notre façon de réagir et d’agir. Ce sont ce que certains appellent des « méta-programmes ». Dans un contexte donné, l’athlète aura des métaprogrammes préférentiels pour se motiver et décider d’une action.
Voici quelques éléments sur la communication avant, pendant et après la compétition.

Le discours veille de match :
La préparation mentale se fait essentiellement la veille ou les jours précédents la compétition. Chaque athlète doit connaître son rôle et ses tâches à effectuer. Le coach peut ainsi questionner l’athlète sur cela :
Comment peux-tu contribuer à ta réussite ?
A quoi dois-tu prêter attention ?
Qu’est-ce qui est particulièrement important de faire selon toi ?
Objectif : rentrer dans la compétition, le responsabiliser.
Pour cela : définitions des buts → présentation du contexte général (adversaire, lieux..)

Le discours d’avant match :
Les athlètes mettent en place des routines qui leur sont propres, routines souvent travaillées avec le préparateur mental, le coach..Les routines sont différentes selon les joueurs.
Lizarazu : « Je me pose, j’essaie de faire le vide dans ma tête ».
Dessailly : « J’essaie de me détacher, de penser à autre chose. Je bouge, je parle..J’adopte toutes sortes de comportements qui me permettent de relativiser. »
Djorkaeff : « Me poser le moins de questions possibles et penser d’abord à me faire plaisir, fermer les yeux et visualiser de belles images de buts que j’ai marqués ».
Trezeguet : « Prendre chaque match comme une fête. Je pense tactique, je me souviens de tous les conseils techniques du coach. Je me visualise sur le terrain dans les meilleures positions. »
Les athlètes n’étant pas réceptifs à ce moment, le discours du coach doit être rapide, précis, rappelant les points forts adverses, les points faibles adverses, pour finir sur les points forts de l’équipe (toujours finir sur une note positive). Le coach peut aussi inscrire quelques mots clé sur une feuille : « engagement, discipline, défense.. ».

Consignes
[sws_ui_icon ui_theme= »ui-smoothness » icon= »ui-icon-check »] [/sws_ui_icon] positivité : « on a bien bossé », « on va gagner », « on est les meilleurs ».
[sws_ui_icon ui_theme= »ui-smoothness » icon= »ui-icon-check »] [/sws_ui_icon] Mots-clés : « fort », « serein », « combat ».
[sws_ui_icon ui_theme= »ui-smoothness » icon= »ui-icon-check »] [/sws_ui_icon] Energie : le discours doit être sanglant et énergique et la conclusion forte.
[sws_ui_icon ui_theme= »ui-smoothness » icon= »ui-icon-check »] [/sws_ui_icon] Rappeler les fondamentaux : « hargne et volonté », « attention au premier quart d’heure ».
[sws_ui_icon ui_theme= »ui-smoothness » icon= »ui-icon-check »] [/sws_ui_icon] Responsabilité : « tu sais ce que tu dois faire », « qu’est-ce qu’on est venu faire ici ? »

discoursLe discours à la mi-temps.
Premier objectif de la mi-temps est le repos. Le coach ne doit pas intervenir dans un premier temps si ce n’est pour dire de récupérer. Avant le retour sur le terrain, il doit à nouveau rappeler l’essentiel, répéter les actions principales à faire, recadrer, replacer, et proposer des solutions techniques et tactiques.

Le discours pendant le match.
Il doit intervenir le moins possible. Les gestes peuvent remplacer les mots : poings fermés pour dire « allez », signe de tête pour dire de continuer. L’objectif est de signifier au joueur qu’il est bien là derrière lui pour le soutenir.
Le joueur en match n’a pas les ressources pour tout enregistrer et modifier : les consignes doivent donc être courtes et précises.
Il doit avant tout transmettre une confiance dans les capacités de l’athlète à vaincre.
L’attitude du coach : calme, motivé, serein, volontaire, digne. Le rôle du coach est de maintenir l’équilibre nerveux entre tension et tranquillité, élevant l’une ou l’autre selon les moments du match, le comportement des joueurs.

Le discours d’après match.
Intervention immédiate dans les vestiaires. Une première analyse de la performance doit être effectuée.
En cas de défaite, le coach ne doit pas laisser repartir chez soi l’athlète avec le sentiment de frustration ou de déception. En s’associant aux joueurs et en partageant la responsabilité de la défaite (on a perdu), le coach permet ainsi de tirer de suite les conséquences et de passer à autre chose. Il résume alors ce qui a été négatif puis positif, ce qui a manqué à l’équipe puis ce qu’à maîtrisé l’équipe pour toujours finir sur un point positif.
En cas de victoire, il est important de laisser exprimer sa joie. Il pourra s’abstenir de discours mais le réalisera alors le lendemain.
Si la vérité reste le résultat, surtout à haut niveau, le coach doit faire en sorte de ne pas juger la partie par rapport au résultat, mais d’évaluer les différents aspects.
Le coach peut aussi questionner les joueurs et demander leurs points de vue respectifs. Cette perspective permet à chaque athlète de s’engager pour travailler et s’améliorer.
Certains entraîneurs comme Raymond Domenech instaurent un debriefing. Chacun, individuellement, devant l’ensemble du groupe exprime ses ressentis, sa prestation, sa part de responsabilité dans le résultat.

Les exemples de communication d’Aimé Jacquet lors du mondial de football en 1998 en sont de bons exemples.
Extrait de l’ouvrage « PNL et performance sportive, un mental pour gagner » de Antoni Girod, Ed Amphora, 1999.

[sws_ui_icon ui_theme= »ui-smoothness » icon= »ui-icon-bullet »] [/sws_ui_icon] Avant le match contre l’Italie :
« Il faut être solide. Il ne faut pas lâcher (..) Vieri, il faut le fixer, ne jamais le laisser dans l’intervalle. Ne soyez pas tétanisés par l’évènement, on est très serein. Mais là, dans le match, il faudra tout mettre ».
On peut noter l’omniprésence du « il faut », qui renvoie à la mission supérieure que s’est fixée Aimé Jacquet pour l’équipe de France et qu’il communique avec un puissant enthousiasme aux joueurs en alternant systématiquement le registre de la recherche de l’objectif : « être solide», « fixer », « tout mettre», et le registre de ce qu’il faut éviter, fuir comme comportement : « ne pas lâcher », « ne jamais le laisser »,« ne soyez pas tétanisés ».

Nathalie Crépin, Florence Delerue

Vivre ensemble, mourir ensemble !

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La cohésion de groupe comme facteur déterminant dans les performances d’une équipe : l’alchimie vers le succès.

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« L’enfer, c’est les autres » écrivait Sartre (1945) dans son ouvrage « huis clos ».
Intuitivement, tous les passionnés de sport savent que derrière tout succès d’une équipe, il y a bien plus qu’une somme de talents individuels. « Le tout est supérieur à la somme des parties. » (courant de la gestalt). Sportifs et entraîneurs lient fréquemment les succès et les échecs à la cohésion du groupe, de l’équipe. Un principe bien connu en sport : un groupe soudé est bien plus efficace que des joueurs œuvrant chacun de leur côté. Les exemples de cette nature foisonnent dans les journaux.

L’équipe de France de football lors de la coupe du monde 2006 nous offre une illustration de l’impact de la cohésion de groupe sur la performance avec sa légendaire formule « vivre ensemble, mourir ensemble », qui dénote à la fois cette profonde attirance pour le groupe mais aussi cette envie d’avancer dans le même sens, vers un but commun. Cette volonté d’être champion du monde n’est pas la seule émulation lors de cette compétition. Une conjoncture tout à fait particulière va unir et souder ce groupe pour lui permettre de « déplacer des montagnes ». Et c’est justement dans la montagne, lors de l’ascension au sommet de la grande Motte, que cette aventure prend un tournant particulier. Domenech, sélectionneur de l’équipe de France a pris soin, lors de cette ascension, de former des cordées de quatre joueurs évoluant aux mêmes postes. « Le but est que les membres de la cordée ne fassent qu’un. Si l’un d’entre eux lâche du lest, les autres sont là pour le motiver » (Domenech). « Pour Raymond, le mondial a démarré avec l’expédition », confirme l’organisateur de la randonnée.

Soccer - 2006 FIFA World Cup Germany - Semi Final - Portugal v France - Allianz ArenaRien de tel en effet pour souder un groupe d’être attaché ensemble, au sens premier du terme, et de pouvoir ainsi relever un défi qui nécessite à la fois de se dépasser mais aussi de faire preuve de solidarité, le tout dans un décor hors du commun, pour un objectif peu commun.

Enfin, un autre ingrédient vient s’ajouter ; chaque match joué après les qualifications est un match couperet pour Zinedine Zidane, footballeur emblématique et charismatique qui stoppe sa carrière à la fin du mondial. C’est l’émulsion d’un groupe qui permet de retarder tous les jours un peu plus sa mise en retraite.

La cohésion est en effet essentielle pour l’efficacité collective et individuelle.
Les caractéristiques de la cohésion.
Carron définit la cohésion des groupes comme « un processus dynamique qui se caractérise par la tendance d’un groupe à se serrer les coudes et à demeurer unis dans la poursuite de ses objectifs ».
Une autre définition est proposée par Festinger (1950) qui définit la cohésion comme « l’ensemble des forces qui agissent sur les membres pour les faire demeurer au sein du groupe ».

Selon ces auteurs, des forces distinctes agissent sur les membres pour les garder dans le groupe. La première est l’attrait du groupe, qui se rapporte au souhait individuel d’avoir des interactions interpersonnelles avec les autres membres du groupe et au désir de participer à des activités de groupe.

teamLa seconde catégorie de force se réfère au bénéfice qu’un membre peut retirer de son association au groupe. Cette seconde catégorie de force est appelée le contrôle des moyens.

Les recherches menées dans ce domaine ont fait ressortir deux concepts permettant de saisir le lien entre la cohésion et le comportement d’un groupe : la distinction entre la cohésion opératoire (phases d’exécution de la tâche) et la cohésion sociale. La cohésion ne se limite pas à l’aspect affectif et social mais elle se réfère aussi à la tâche.

La cohésion opératoire et la cohésion sociale sont deux composantes indépendantes. La cohésion opératoire est le degré de collaboration des membres du groupe dans la poursuite d’un but bien précis.

La cohésion sociale est le degré d’attirance entre les membres du groupe et le degré de satisfaction des membres de ce groupe à évoluer ensemble.

Ces deux composantes sont donc indépendantes dans le sens où les membres d’un groupe peuvent tendre vers un but sans pour autant qu’il y ait un sentiment fort entre les membres de ce groupe. Le monde sportif nous offre des exemples multiples dans ce sens.

En 1992, Carron et Spink ont démontré qu’il y a une adhésion plus évidente à un programme d’activités physiques lorsque la cohésion sociale du groupe s’améliore.

Modèle conceptuel de la cohésion des équipes sportives de Carron : les déterminants de la cohésion.
Figure 5 : Modèle de Carron
modele de carron

Les facteurs environnementaux, personnels, d’équipe et de leadership sont déterminants dans la cohésion au sein d’un groupe et ceci va fortement influencer les performances.

Cohésion et performance.
Le concept de performance ne se limite pas au fait de gagner. Il englobe à la fois les résultats positifs mais aussi l’atteinte d’objectifs fixés. Une équipe peut par exemple se fixer comme objectif de se maintenir dans la même division, et cet objectif, s’il est atteint, constitue une performance. La performance peut aussi être rattachée aux notions de transformation et de progression, comme améliorer son revers lifté par exemple.

Les recherches ont invariablement montré qu’il existait une forte corrélation entre la cohésion et la performance sportive. Cette corrélation est plus forte pour la cohésion opératoire. Cette relation entre cohésion et performance est circulaire : si la cohésion augmente la performance sportive, le succès renforce la cohésion.
De même, les groupes sportifs qui font preuve d’un niveau élevé de cohésion, essentiellement de cohésion opératoire, augmentent leur efficacité collective (Kozub et Mc Donnell, 2000). Mais cette cohésion doit être homogène, c’est-à-dire que l’ensemble du groupe doit être concerné et non pas seulement les plus performants. Par exemple, cette cohésion doit être forte chez les titulaires d’une équipe, mais également chez les remplaçants, si l’entraîneur souhaite augmenter son efficacité collective.

Ainsi la victoire dans une compétition ne revient pas forcement à l’équipe constellées de stars qui réunissent les plus grandes qualités tant sur le plan physique, technique, tactique et mental. Et les exemples sont nombreux.

« Personnellement, je vois l’équipe comme un tissu complexe de compétences et d’émotions où il est difficile d’évaluer les mécanismes de stagnation et de régression. Une équipe marche bien s’il ya une part conséquente d’éléments de liens, d’écoute, d’amour, de joie d’être ensemble, ces choses qui font que l’on se transcende naturellement. Regardez l’équipe de France de foot de 1998-2000 : les liens comptaient plus que les compétences. En 2002, c’était l’inverse. Ma préoccupation, quand j’étais entraîneur, était toujours d’extraire le meilleur potentiel relationnel d’un mélange de personnalités. Sur le terrain, il fallait des guerriers, des artistes, des stratèges.» (Daniel herrero, Toulon et PUC, rugby).

Nathalie Crépin, Florence Delerue